Rappelez vous : dans votre jeunesse, vous aimiez accompagner votre mère à l’hypermarché le samedi, afin de négocier un ou deux jouets, rencontrer des personnes et choisir desserts ou gâteaux pour le goûter. Ce rituel de la grande consommation, où vous passiez 2h à faire vos courses, a pris un sérieux coup dans l’aile.

Bienvenue dans l’ère du temps réel où le consommateur ne réalise plus ses achats et emplettes qu’en fonction de l’enseigne mais également (et surtout) en fonction d’un service : la livraison (notamment marqué dans l’univers de la grande distribution).

A y voir de plus près, les professionnels proposent aux consommateurs des services leur permattant toujours plus d’économiser du temps et d’optimiser leur planning en fonction des contraintes individuelles. Reprenons notre exemple des courses familiales réalisés dans un hypermarché :

L’ère de l’hypermarché

trajet aller – prise du caddie – achats en hypermarché – dépôt des courses dans la voiture – restitution du caddie – trajet retour – transfert des courses vers le domicile (pensez aux personnes vivant au 5ème étage sans ascenceur) – rangement des courses
Temps approximatif : 2h

L’ère du drive

commande sur internet – choix du créneau horaire – (préparation de commande le jour même ou le lendemain) – récupération des courses – trajet retour –  transfert des courses vers le domicile  – rangement des courses
Temps approximatif : 45 minutes

L’ère de la livraison à domicile

commande sur internet – choix du créneau horaire – (préparation de commande pour le lendemain) – récupération des courses au pied du frigo – rangement des courses
Temps approximatif : 25 minutes

Le drive bouleverse les comportments depuis quelques années. Les 2000 drives actifs sur le territoire national (source : marketing PGC) connaissent un fort succès pour la plupart. Placés sur des axes routiers de fort traffic, ils s’implémentent bien dans les trajets quotidiens de leurs clientèle afin de leur offrir un service peu consommateur de temps.
En quelques années, les consommateurs ont délaissé les larges allées de leur hypermarché pour une place de chargement à côté d’une borne.
Et à mon avis, la révolution n’est pas finie !

La timide percée de la livraison à domicile (versus les 3 Milliars € générés en 2013 par le drive) depuis quelques années cache une croissance exponentielle de ce mode de livraison dans les prochaines années.

A l’instar du modèle PickUp in Store (commande en ligne et retrait en point de vente ou point relais) initié (ou plutôt popularisé) par la grande distribution il y a 10 ans, le modèle de livraison à domicile devrait progressivement être plébiscité par les consommateurs à mesure que les services du genre s’organisent. Il faut dire que le modèle a de l’avenir, répondant notamment à un trait de caractère de plus en plus présents chez les consommateurs : l’impatience

L’économie de l’impatience

Bien que les enseignes d’hypermarché aient développé depuis longtemps la livraison à domicile (souvenez vous de Carrefour avec Ooshop), ce sont des startups qui dynamisent l’économie de l’impatience en France. Et au niveau mondial, on retrouve 3 majors de l’internet et de l’e-commerce : Ebay, Amazon et Google.

Amazon Fresh

Amazon freshPrésent à Seattle, San Francisco et Los Angeles, Amazon Fresh propose un service de commande et de livraison sur des produits alimentaires (frais et non frais) et sur des produits non alimentaires (notamment son catalogue de produits). Ils intègrent également la livraison de produits provenant de restaurants et de magasins d’alimentation locaux.
Fidèle à sa stratégie notamment basée sur un service de livraison efficace et  rapide, Amazon Fresh livre ses clients dans la journée (s’ils ont commandé avant 10h du matin).
Amazon ambitionne de déployer son modèle en Europe dès 2015. Pour plus d’infos, lire ce post de Michel de Guilhermier.

Fort conscient de la croissance de l’économie de l’impatience, Amazon Fresh vient de développer Dash, un outil de Home scanning permettant de commander ses produits à l’aide d’un scan avec reconnaissance vocale incluse.  Un pas de plus vers la réduction du temps pour faire les courses.

Ebay Now

Ebay NowEbay Now livre vos courses en moins de 2 heures à Chicago, Dallas, San Francisco ainsi que quelques quartiers de New York. Ebay Now se concentre sur la livraison et développe des partenariats avec des enseignes de grande distribution comme Target ou Macy’s, des enseignes de distribution sépcialisée comme Best Buy ou ToysRus.
Ebay compte ouvrir 25 localisations aux US en 2014. Pour s’épandre en Europe dès 2015 ?
5$ : le prix de la livraison en moins de 2h pour un minimum de 25$ d’achats. A ce prix là, l’impatience grandit !

Google Shopping Express

Google Shopping ExpressLa boîte de Mountain View a également décidé de s’inviter dans la bataille. Le service Google Shopping Express propose aux habitants de San Francisco et de San José un impressionant nombre de références sur des produits alimentaires et non alimentaires. Google adopte un suystème proche de celui d’Ebay Now avec des partenariats comme Target, Whole Foods Market….
Pour faire adopter le service, Google met les moyens : une livraison gratuite dans la journée pendant les 6 premiers mois.

 

Bonus

INSTACARTInstacart, fondé par un ancien d’Amazon, livre des produits alimentaires de Wholde Foods ou d’autres marchands (plus de 100 000 références disponibles) en 1 heure dans 6 villes des US.

PostmatesPostmates vous livre le plat de votre meilleur restaurant ou votre iPhone le plus rapidement possible. S’appuyant sur une communauté de livreurs, la startup de la baie revendique des partenariats avec plus de 1000 commerces  et propose des livraisons sur San Francisco à partir de 5$. Avec une promesse de salaire de 30$ l’heure, Postmates devrait trouver des supers héros de la livraison sans difficulté.

UBER vient d’annoncer le lancement de son service RUSH, disponible à New York. RUSH s présente comme un service de coursiers avec une promesse de livraison dans l’heure. Avec des prix entre 15 et 30$, Uber a flairé le potentiel inscrit sur ce marché et avance ses pions à NYC, avant sûrement d’étendre le service à d’autres villes.

Et la France dans tout ça ?

Les trublions du marché s’appellent Toktoktok, Deliver.ee ou CoCourse et ils n’ont qu’un seul objectif : vous livrer vos envies en un minimum de temps !

ToktoktokToktoktok s’appuie sur une communauté de runners pour livrer vos produits en un temps record 7j/7 et 24h/24 pour un coût de livraison de 5€ minimum…
Déployé à Paris, la startup a su convaincre de grandes enseignes pour s’appuyer sur réseau de 150 partenaires, dont la Fnac, Darty, Monoprix, Leroy Merlin, mais aussi des pharmacies ouvertes la nuit, des patisseries, restaurants…

 

delivereeDeliver.ee se revendique comme le premier réseau de coursiers urbains permettant de livrer vos colis, commandes et autres plis dans la journée (en moins d’une heure trente si possible). Deliver.ee base sa tarification sur l’impatience, à savoir que plus vous souhaitez livrer ou être livré rapidement, plus le prix augmente : 14,99€ pour une livraison en 1h30, 5,99€ pour une livraison sous 3h. La jeune pousse fait ses débuts mais affiche un très beau potentiel.

CocourseFaites vous livrer vos courses par le voisin. A l’ère de l’économie collaborative, Cocourse développe une communauté sur l’Hexagone afin de proposer un service de livraison efficace et convivial. La startup n’en est qu’à ses débuts mais peut s’appuyer sur une tendance de fond qui ne fait que s’amplifier.

 

logo_colis-webLes Lillois de ColisWeb proposent un service de livraison en moins de 2h pour des e-marchands crosscanal (possédant un réseau de boutiques). Présent dans 8 villes, Colisweb recrute des transporteurs des coursiers spécialistes du dernier kilomètre. Colisweb a déjà développé un plugin pour les CMS e-commerce Magento et Prestashop.

 

Evian, le précurseur

La marque d’eau minérale a trouvé la formule pour rester jeune dans le coeur (et le portefeuille) de ses consommateurs. Balayant d’un revers de main le sacro-saint rapport de forces entre marques de PGC (Produit de Grande Consommation) et enseignes de distribution, Evian a compris avant les autres que le juge de paix et le principal décisionnaire est le consommateur. Evianchezvous.com propose la livraison à domicile depuis début 2012. Cette désintermédiation entre le producteur (Evian) et le consommateur au détriment du distributeur est motivée par plusieurs motivations de la part du consommateur : la praticité (packs lourds et volumineux directement livrés au pied du frigo),  la liberté sur les dates et horaires de livraison et le déalis (livraison  en 24h)

Standardisation du produit, différenciation du service

Préférez vous acheter votre baril de lessive chez Auchan, Leclcerc ou via Toktoktok, EbayNow ou encore Amazon Fresh ?
C’est bientôt la question que vous aurez à vous poser. Le marché des biens de consommation, et notamment des produits alimentaires est standardisé. Hormis le critère de variation (somme toute légère) du prix, vous trouverez les mêmes produits chez l’ensemble des acteurs.

Si le produit ne se différencie pas, c’est le service qui fera la différence. Et il est fort à parier que les nouveaux entrants vont mener la vie dure aux historiques enseignes de distribution : système logistique performant, service de commande optimisé, culture digitale exarcerbé sont autant d’avantages concurrentiels. Mieux, un Toktoktok ou un Ebay Now pourront proposer de livrer en même temps les courses de Madame (grande distribution) pour remplir le frigo, le vin de Monsieur (Nicolas) pour le repas de samedi et la robe de Mademoiselle (Mango) pour la fête de ce soir ! Le Same Day Delivery va faire des émules.

La grande distribution va devoir faire face aux startups et mastodontes du web mais également à leurs fournisseurs (cf. Evian) qui tenteront de s’affranchir progressivement de la distribution classique. Le match ne fait que commencer.

Dans un monde où le temps réel devient la norme et une obsession, l’économie de l’impatience a de beaux jours devant elle !

Sources :
JDN
http://www.journaldunet.com/ebusiness/commerce/enquete-livraison.shtml?utm_source=greenarrow&utm_medium=mail&utm_campaign=ml50_mega-accelerate

Challenges – 2000 drives
http://www.challenges.fr/economie/20140325.REU2640/le-nombre-de-drive-depasse-celui-des-hypermarches.html

Marketing PGC 
http://www.marketing-pgc.com/2013/08/13/plus-de-2500-drives-en-france-et-une-premiere-fermeture-pour-carrefour/

Tomtom
http://business.tomtom.com/lib/doc/downloads/fr_fr/ttb-customer-service-research-2012.pdf

CA du drive en 2013 
http://www.liberation.fr/economie/2014/03/21/les-drives-a-l-age-du-doute-apres-10-ans-d-expansion-tous-azimuts_988828

Ebay
http://www.numerama.com/magazine/27303-ebay-now-ambitionne-de-livrer-le-jour-meme-de-la-commande.html

Uber
http://siliconvalley.blog.lemonde.fr/2014/04/08/uber-lance-un-service-de-coursier-a-new-york/