Avant de développer cette idée qui peut vous paraître saugrenue, il convient de replacer les évolutions historiques du marketing.
L’interruption marketing a vu sa croissance dopée par l’essor des mass medias. Les annonceurs pouvaient inonder le marché de messages à condition d’avoir un budget média conséquent. Les consommateurs-cibles étaient donc interrompus afin d’être soumis à une publicité.
L’interruption marketing a trouvé une nouveau souffle sur le web avec le développement des Pop-up, du display, des pré-roll..
Le permission marketing trouve sa genèse dans l’analyse d’un constat : les messages diffusés non sollicités par un consommateur sont peu efficaces. Le permission marketing fait passer le consommateur d’indifférent à consentant au message délivré. Le consommateur a donc répondu favorablement à une première sollicitation de l’annonceur (opt-in…).
L’évolution notable est la préoccupation des annonceurs au niveau des besoins et des intérêts des consommateurs.
Les systèmes de fidélisation, le développement des newsletters sont généralement basés sur le permission marketing.
Je laisserai la conclusion de cette ère à Seth Godin : “turning strangers into friends, and friends into customers.”
L’interaction marketing, une nouvelle ère marketing
Le consommateur n’est plus interrompu, il ne donne même plus sa permission : le consommateur a besoin d‘interactions et d’un engagement de la marque afin de développer de l’attention pour cette dernière.
Exit le spot de 30 secondes sur TF1 ou la newsletter, le moyen le plus efficace de toucher votre cible et de faire passer des messages est aujourd’hui l’interaction. Créer des relations et engager des conversations avec vos clients : voilà le nouveau métier des « marketeux ».
L’internaute au cœur de l’interaction marketing
Le 2.0 et les réseaux sociaux sont autant de technologies ayant développé la prise de parole des internautes. Sans écrire que chaque internaute est un média potentiel, les réseaux numériques sont devenus des moyens pouvant diffuser une information grande échelle et à grande vitesse. Le 2.0 a désintermédié les échanges et a bousculé les rapports de force. Le bouche à oreille (word of mouth) devient planétaire (world of mouth), ce qui a pour conséquence de médiatiser les moindres événements ou opinions. Une mauvaise expérience consommateur peut se transformer en bad buzz mondial (rien de nouveau sous le soleil me diriez-vous !).
Le cercle de confiance du consommateur est passé de quelques amis à des milliards d’internautes. Que vous vendiez des voyages, des voitures, des crèmes apaisantes pour nourrissons ou de l’assurance, vos problématiques sont similaires. Vos discours, argumentaires commerciaux ou autres sites vitrine souffrent d’un manque d’attention évident et ce sont vos clients et non clients qui détiennent le pouvoir de recommander (ou non) vos produits.
La réputation des marques comme enjeu de l’interaction marketing
Les sources (journalistes, internautes, blogueurs…) s’exprimant sur votre marque détiennent communément votre capital de réputation. Et du soin apporté à votre réputation dépend aujourd’hui le développement de votre business.
- Soigner votre réputation demande tout d’abord d’écouter ce qui se dit sur votre marque, vos produits, la qualité de vos services…
- Soigner votre réputation, c’est ensuite traiter les points d’optimisation en interagissant avec vos clients afin de faire remonter les attentes.
- Soigner votre réputation, c’est aussi intégrer vos clients dans vos process de réflexion sur les produits et /ou services que vous proposez (cf. Social CRM) car qui mieux que le client peut vous dire ce qui est bien pour lui ?
- Soigner votre réputation, c’est donc de répondre aux attentes et besoins latents ou exprimés par le client.
Loin de sonner le glas du marketing de l’offre, les enjeux de l’interaction marketing révèlent tout de même une constante : le client n’a jamais été aussi près (au sens physique du terme) de la direction marketing des marques.
La démonstration par l’exemple va permettre de nourrir mon propos.
Prenez Starbucks :
L’ensemble des professionnels du digital louent la stratégie de Starbucks basé sur l’interaction et l’engagement de la marque auprès de ses clients. Il est vrai que Starbucks teste, innove, lance des nouveaux dispositifs notamment sur le Social Media afin de créer de nouvelles expériences utilisateurs. Nous avons l’impression que chaque fois que Starbucks lance un dispositif, celui-ci fonctionne comme par magie. La vérité est sûrement ailleurs.
Starbucks est une firme qui promeut l’authenticité et la transparence vis à vis de ses publics. Les évolutions du concept Starbucks sont issues d’une écoute attentive et de conversations avec les clients.
L’exemple de MyStarbucksIdea est caractéristique : ce sont les clients qui proposent et votent pour les idées visant à optimiser le concept Starbucks (produit, service, qualité, environnement, RSE…).
Starbucks a intégré une dimension essentielle au cœur de sa stratégie : l’écoute et l’opinion des clients.
MyStarbucksIdea, plateforme de crowdsourcing, est un véritable laboratoire d’idées permettant de faire émerger les évolutions futures de la stratégie marketing mais aussi de la politique environnementale.
Au final, « Mieux je connais mes clients, mieux je peux répondre à leurs attentes et aspirations, mieux je soignerai ma réputation ». Cette simple phrase peut représenter la définition d’un cercle vertueux pour une marque.
L’expression d’Alexandra Wheeler, Digital Strategy Director of Starbucks, peut résumer la philosophie de la marque : « It’s about relationships, not marketing »
Je sais que ce billet va faire grincer des dents quelques directeurs marketing mais dites moi quelle marque ayant adopté une stratégie basée sur l’écoute et l’interaction n’est pas un succès ?
Plus concrètement, le consommateur a changé de paradigme, aux marketeurs de changé le leur.
Ton billet me fait penser de suite à une conversation que j’ai eu avec deux copains récemment qui assimilaient notre métier à celui de pubards et donc avec une connotation négative!
J’ai eu un mal fou à leur faire comprendre que cela allait plus loin que le simple fait de devoir convaincre (pour ne parler que du résultat final) un consommateur d’acheter ou de consommer un service ou un produit. Ils ne voyaient pas l’intérêt et surtout le bien fondé de la marque à engager cette conversation. “Mais de tout manière tu auras beau tourner ton argumentaire dans tous les sens au final c’est de la publicité” concluaient-ils.
J’étais face aux deux plus gros sceptiques de la table sans aucun doute! Et bien évidemment face à deux personnes ne voyant que dans les réseaux sociaux du voyeurisme et donc d’une inutilité déconcertante.
Une question me vient faisant suite à ton excellent billet. Comment alors engager la conversation avec ce genre de personnes hypra réfractaires à toutes tentatives de communication des marques? Leurs avis ne comptent ils pas pour autant?
Par ailleurs j’ajouterai comme exemple un cas bien français, celui de Michel et Augustin qui à travers leur communication décalée, leur proximité avec les gens, leur simplicité surtout, ont conçu un concept au plus près de leurs clients>>> il n’y a qu’à voir l’ouverture de leurs portes au public un jeudi par mois!
Julie,
Tu poses une excellente question. Premièrement, le métier de community manager ne s’est pas imposé, il est la résultante de nouveaux comportements et usages sur le web. Plus que de faire de la communication, le community manager gère de la relation.
Par rapport à des consommateurs réfractaires à la publicité et à toute forme de communication, je crois que la relation marque-consommateur doit reposer sur une envie commune d’échanger. Si certains consommateurs sont fermés à toute conversation, il convient de ne pas les relancer maintes fois. Après je crois que chaque comportement est singulier et que le consommateur type n’existe plus. Poses à tes copains la même question sur une marque avec laquelle ils ont une forte affinité, du moins une grande fidélité (il doit bien y avoir une marque ;)) : je suis quasiment persuadé que leur réponse sera plus nuancée. Tout est question d’engagement du consommateur vis à vis de la marque : il y a des avocats de la marque (clients fidèles recommandant et défendant la marque), les client fidèles, les clients multi-fidèles (qui achètent la marque et parfois la marque concurrente en cas d’indisponibilité), les clients volatiles et les prospects.
Dans l’interaction marketing, l’échange se fait sur une relation bilatérale : l’engagement se doit d’être mutuel. Et il est important de discuter avec tous les profils, à condition que ceux-ci soient prêts à s’engager. Tout le monde a un avis, mais tout le monde n’est pas prêt à le partager : cela dépend du contexte, de la marque, du support et de bien d’autres indicateurs…. Au community manager de déceler et stimuler ceux qui souhaitent donner leur avis et/ou échanger avec la marque.
Je veux bien rencontrer tes copains, les avis contraires font souvent des débats constructifs 😉
Article bien rédigé, je t’invite à voir le business modèle de Quirky http://www.quirky.com/
Merci 🙂
Je connais un peu Quirky, il est vrai que le business model et l’approche communautaire sont dans la même veine que l’écoute du consommateur. Je dirais même que Quirky est une belle illustration de cette tendance de la “voix du consommateur” poussé à son paroxysme.